Enquête: Qui sont les commanditaires de l’assassinat politique d’Elhadji Oumar Lamine Badji ?
Elhadji Oumar Lamine Badji, le président du Conseil régional de Ziguinchor, également membre du Comité directeur du Parti démocratique sénégalais (PDS au pouvoir en 2006), a été capturé par ses assaillants dans la nuit de samedi à 30 décembre 2006 vers 20 heures dans son village natal de Sindian, à cinquantaine de kilomètres au nord de Ziguinchor. Ces hommes armés de fusils l’ont ensuite égorgé et brûlé sa maison ainsi que son véhicule avant de s’évanouir dans la nature.
Le corps du défunt a été transféré vers 1 heure du matin le dimanche 31 décembre à l’hôpital régional de Ziguinchor par l’armée sénégalaise, en attendant la décision des autorités relative aux funérailles.
En ce jour, El.hadji Oumar Lamine Badji était la deuxième personnalité politique de la région casamançaise à avoir été assassinée, après Mamadou Cissé, un député du Parti socialiste, tué dans les mêmes conditions, il y a 16 ans.
L’on s’interroge encore aujourd’hui sur le mobile de cet acte ignoble, mais pour brouiller les pistes, beaucoup de « vendeurs de haine » ont rapidement lier cet assassinat aux représailles promises par Attika la branche armée du MFDC farouchement opposée à l’opération de déminage de la Casamance, entreprise par l’armée sénégalaise.
Plus de six ans, l’enquête piétine et des zones d’ombres subsistent. Notre enquête révèle les dix points du puzzle:
- Elhadji Oumar Lamine Badji, selon les propos d’un de ses fils en France, avait reçu plusieurs menaces de mort alors qu’il occupait le fauteuil de président du Conseil régional de Ziguinchor.
- A Bignona, il y avait deux tendances protagonistes, à savoir celle animée par feu Oumar Lamine et celle d’Abdoulaye Badji, il y avait des problèmes nés à la veille de la présidentielle de 2007 entre ces deux protagonistes politiques. Le premier nommé était le Secrétaire Général de la Fédération PDS de Bignona tandis le second voulait le supplanter à ce poste et avait l’appui politique et financier d’Abdoulaye Wade et de Farba Senghor. A qui profite le crime?
- Deux jours après son assassinat, Abba Diédhiou, le premier suspect, militant du PDS a été arrêté par la gendarmerie. Lors de son transfert a Bignona, « il aurait sauté hors du véhicule qui roulait en vitesse. Grièvement blessé il succombera de sa blessure». Une telle version des faits est trop légères: N’a-t-il pas était purement et simplement assassiné pour ne pas impliquer d’autres personnalités de la hiérarchie du PDS ? Ce que notre journal a pu vérifier que son corps a été inhumé dans l’anonymat en catimini dans son village natal. Pourquoi un tel empressement?
- Abdoulaye Wade n’avait-il pas déclaré lors des obsèques que même si les commanditaires se trouvaient dans sa formation politique, ils seraient châtiés comme il se doit avant de conclure il avait conclu en promettant à celui ou celle qui dénoncerait toutes les complicités dans cet assassinat, une forte récompense. Quel est le sens d’une telle déclaration qui supposerait qu’un coup préparé en haut lieu et exécuté par des complices à savoir des responsables locaux de Bignona reste vraisemblable. Lesquels ne pouvaient jamais accepter qu’il soit élu député. Mieux, il aurait été pressenti pour un poste de ministre. Et comme il avait toutes les chances d’obtenir une brillante promotion en sa qualité de militant émérite de la localité de Bignona, il était temps pour ses détracteurs de procéder à son élimination physique et politique pour ensuite accuser le MFDC.
- Le Samedi 6 janvier 2007, l’actuel président du conseil rural, Ansoumana Badji a été entendu mais sa déposition s’est « bizarrement» volatilisée du dossier.
- Le nom de Farba Senghor ancien ministre de Wade a été cité plusieurs fois dans le dossier, mais la Justice sénégalaise tarde six ans après, d’entendre cet ancien dignitaire du régime alors que croupissent une dizaine de membres du MFDC dans les prisons au su de tous les politiciens de la Casamance qui n’ont osé lever le petit doigt. Des prisonniers politiques qui sont sans accusation ni condamnation. Dans quel état de droits sommes-nous? Qui protège donc Farba Senghor ? Et pourquoi ? Pourquoi donc sacrifier des Casamançais dont le seul tord est d’appartenir au MFDC ?
- Le gendarme (Nous tairons volontairement son identité) qui avait mené l’enquête et sur le point d’arrêter les véritables présumés coupables notamment l’un des cerveaux présumés de l’assassinat, qui était en cavale depuis le 06 février 2007 en Gambie, a été muté manu militari à « Ndoukoumane ».
- Dans une interview au journal « le Témoin » Monsieur Seydou Badji membre de la famille martèle : « Les vrais assassins et commanditaires courent toujours à visage découvert puisqu’ils sont dans les hautes instances du Pds. D’autres se sont réfugiés dans l’APR de Bignona. Seuls quelques assassins ont été arrêtés alors que Omar Lamine Badji a été assassiné par une section de « commandos » qui a été préparée et équipée par des commanditaires. Lesquels ont soigneusement mûri leur plan.»
- Pendant cinq ans, la famille sans cesse écrit au président de la République d’alors, Me Abdoulaye Wade, et réclamé justice. Celui ne daigne jusqu’à nos jours répondre par politesse. Et pourtant il suffit que son fils passe une semaine à la prison de Rebeuss que Monsieur le Président saute dans l’avion au secours de son cher. Que représentent donc la famille Badji, les prisonniers du MFDC et même la Casamance pour Maître Wade ?
- Pourquoi Abdoulaye Baldé qui était dans le pouvoir de Wade et s’occupait entre autres des renseignements (ancien officier de la police) n’avait dit mot sur cette nébuleuse affaire ? Pourquoi attendre maintenant qu’il soit inquiété par la justice sénégalaise (enrichissement illicite) pour intervenir sur le dossier ?
Les deux épouses veuves d’Elhadji Omar Lamine Badji, ses enfants dont un agronome Alassane Badji, et une fille au collège en Angleterre, un universitaire en Droit public en France et un autre qui a déjà cessé de suivre sa formation en marketing et en communication au Maroc, ensemble avec toute la Casamance, demandent que justice soit faite et que les innocents en prison soit libérés et rétablis dans leurs droits.
Emile Tendeng