Processus de paix en Casamance : Le régime de Macky Sall en panne de vision
Bien que disposé à négocier avec le Mouvement des Forces Démocratiques de la Casamance, le constat est réel que le Régime du Président Macky SALL est totalement en panne d’une vision précise et ne sait toujours pas comment entamer un début de négociation sérieuse malgré un contexte sur le terrain qui lui est très favorable.
En effet, dès son accession a la tête de la république du Sénégal, le président Macky Sall a clamé haut et fort, à qui veut l’entendre son désir et sa détermination à négocier avec le MFDC pour un retour rapide de la paix en Casamance. Mieux, il est allé beaucoup plus loin dans sa déclaration que tous ces prédécesseurs en notant qu’il est prêt, dans le cadre des pourparlers, à rencontrer les combattants partout où ils le souhaiteraient, même si c’est au niveau de la planète mars.
Son discours a suscité un énorme espoir auprès des populations, un espoir renforcé par les déclarations des principaux chefs rivaux d’Atika en l’occurrence César Atoute Badiatte, mais surtout Salif Sadio réputé comme étant le plus radical de tous les dirigeants du MFDC qui ont également exprimé leur souhait d’aller à la table des négociations afin de trouver une issue à la crise. Ils ont été suivis peu après par Ousmane Gnantang Diatta qui, à travers un discours télédiffusé, a exprimé sa décision de renoncer à la lutte armée et son vœu d’aller aux négociations.
Aussi à l’image de tous ces chefs cités, le MFDC dans l’ensemble de ses composantes est disposé à dialoguer, offrant du coup au régime de Macky SALL une opportunité jamais obtenue encore une fois par ces prédécesseurs dans le cadre de la recherche de la paix.
Le MFDC malgré ses divergences internes a lié l’acte à la parole : Salif Sadio, le va-t-en guerre, a libéré les otages militaires qu’il détenait et César Atoute Badiatte, à son tour, a fait la même chose avec les démineurs qu’il avait en otage. Et le contenu des discours qu’ils ont tenu lors des cérémonies de remise des otages était identique. Chacun d’entre eux a réitéré sa ferme volonté d’aller à la table de négociation et a invité le président à ouvrir des négociations le plus rapidement possible.
Hélas, le président sénégalais traine à donner une réponse concrète à la main tendue du MFDC qui est pourtant dans de sincères dispositions de négociation. Et si ce n’est pas le cas, alors on ne comprend pas pourquoi son silence ou cette lenteur à prendre une décision politique pour engager des pourparlers tant réclamés par tous les acteurs et toutes les composantes de la population casamançaise.
Cette attitude du régime du président Macky Sall nous étonne. Et pourtant c’est le président lui qui a dit qu’il fait de la question casamançaise une supériorité à tous les niveaux. Et le seul acte que nous avons enregistré de son coté, c’est son fameux voyage en Gambie pour rencontrer son homologue Yaya Jammet à qui il a offert des noix de cola et manifesté son intention de le voir s’impliquer dans la recherche de la paix en Casamance. Pour le reste, le président Macky SALL ne s’est limité qu’à une déclaration d’intention.
De notre coté, nous avons essayé de savoir pourquoi malgré une situation qui lui très favorable, le président Sénégalais traine toujours les pieds ? La réponse, tenez vous bien, est que selon notre humble avis, le régime actuel n’a tout simplement ni de vision ni de feuille de route précise sur comment il compte se prendre par rapport aux négociations en faveur du retour de la paix en Casamance.
Et tant que cette situation perdure et tant qu’à leur niveau ils ne parviennent pas à un schéma clair sur comment négocier, par ou commencer et avec quels intermédiaires clairement identifiés, il restera toujours au stade de départ, c’est-à-dire à ses déclarations de principes.
Ce manque de feuille de route fait que le régime actuel est en train de répéter les mêmes erreurs que ses prédécesseurs concernant la méthode de négociations. Il est dans la même logique qu’Abdou DIOUF et Abdoulaye WADE qui consiste à se servir à la fois de plusieurs intermédiaires ou démarcheurs pour nouer le contact avec le MFDC.
Ainsi, il y a sur le terrain plusieurs groupes aux démarches et méthodes différentes, et qui se livrent une rivalité indescriptible pour soit disant une même cause : celle de parvenir à une paix définitive en Casamance. Tous se disent envoyés par le président Maky Sall pour aider à rechercher la paix en Casamance. Mais, c’est des groupes qui sont en train de retarder le processus de paix à travers les actes qu’ils posent. Parmi ces démarcheurs on note : le Groupe de réflexion pour la recherche de la paix en Casamance dirigé par le ministre Robert sagna ; le groupe de Boubacar Diouf et celui de Amsatou Sow Sidibé etc.
Le groupe dénommé « groupe de réflexion sur le processus de paix en Casamance « (GRPC). Il est dirigé par l’ancien ministre Robert Sagna. Ce groupe est constitué essentiellement d’anciens hauts cadres originaires de la Casamance naturelle. Ce groupe a été visible dans la libération des otages par Salif Sadio et César Atoute Badiatte et même s’ils n’ont pas encore de grande avancée dans le processus de paix, ils ne cessent de multiplier les rencontres au Sénégal, en Gambie et Guinée Bissau dans ce sens. Ils s’activent pour disent –ils proposer au MFDC une alternative à l’indépendance.
Le groupe de Boubacar Diouf avec ses acolytes, l’Amiral Sarr, le Général Charlemagne Préira, Abdou Cissé, César Coly et Pape Cissé. Tout comme le groupe de Robert Sagna, ils ont, à leur façon, joué leur partition dans la libération des otages. Mieux, ils avaient même tenté d’obtenir un accord de déminage avec César Atoute Badiatte.
Enfin arrive le groupe de Madame Amsatou Sow Sidibé, celle qui a déclaré dans la presse faire de la paix en Casamance son affaire personnelle, autrement dit sa chasse gardée, son bébé à elle seule pour être plus précis. Ce groupe du ministre de Macky SALL par ailleurs chargée de la paix n’a pas encore un pied ferme en Casamance malgré les nombreuses sorties médiatiques de son leader. Il est au stade de gestation et est en train d’élaborer sa stratégie.
Ce que nous déplorons dans cette histoire de démarcheurs de la paix, est qu’ils se livrent une rude concurrence. Chacun développe contre l’autre une politique de dénigrement et de décrédibilisassions aux yeux du MFDC et des autorités sénégalaises. Il n’existe aucune complémentarité ni connexion entre ces groupes qui pourtant prétendent travailler au nom du président de la république Macky SALL en faveur du retour de la paix en Casamance.
Et la semaine dernière pendant que Robert Sagna en compagnie de certains membres du clergé de Ziguinchor étaient à Sao Domingo en train de discuter avec les éléments de César Atoute Badiatte, Boubacar Diouf et son groupe s’étaient rendus à Rome pour Discuter avec la communauté St Egidio en présence d’une délégation envoyée par Salif Sadio.
N’allez surtout pas me dire que les hautes autorités ne sont pas au courant de ces démarches et rencontres qui ne pourraient avoir lieu sans leur bénédiction.
Le régime de Macky SALL doit se ressaisir et revoir sa politique de gestion du conflit casamançais si réellement il souhaite aboutir à une paix définitive en Casamance. Il doit savoir ce qu’il veut et comment l’obtenir.
Nous sommes persuadés que même si le régime actuel ne parvient pas à la paix définitive au cours de ce mandat, il pourra s’il s’y prend bien et pendant qu’il est encore temps être celui qui aura dans l’histoire de la crise en Casamance tracé la voie irréversible vers la paix.
Nous sommes convaincus de nos propos parce que tous les ingrédients sont réunis pour y arriver, il suffit de les réunir, de bien préparer le plat et le servir pendant que les gens ont encore faim de cette paix. Nous voulons dire par là que le régime actuel doit tout faire pour exploiter ce climat favorable aux négociations en se dotant d’une feuille de route bien précise.
Malgré que le gouvernement traine toujours les pas, le MFDC est toujours resté dans sa dynamique d’ouverture au dialogue et sur le terrain on a noté une accalmie quasi-totale gage de l’engagement du mouvement à dialoguer.
René Capain BASSENE
Journaliste et spécialiste en communication
Observateur du conflit casamançais