Casamance: Qu’est-ce qui retarde le processus de paix ? René Capain Bassène répond.
Le considérant comme étant l’observateur le plus crédible du processus de paix en Casamance malgré son jeune âge, nous avons rencontré Monsieur René Capain BASSENE pour demander son avis sur les principaux facteurs bloquants du processus de paix en Casamance.
Monsieur Bassène, malgré l’accalmie notée sur le terrain en Casamance, vous soutenez invariablement que le processus de paix n’a connu aucune avancée significative. Maintenez – vous toujours votre affirmation ?
Sans hésiter je vous réponds par la positive. En claire je dirai sans détour que je maintiens et réitère ma position que jusqu’à ce jour 26 janvier 2014, le processus de paix ne connait une évolution. Il n’existe que de nom.
Selon vous quels sont les facteurs explicatifs d’une telle situation ?
En guise de réponse, je dirai au risque de me répéter que ce conflit comprend un dedans, un dehors, un ou plusieurs à cotés, un dessus, un dessous, un à gauche et un à droite si bien imbriqués les uns dans les autres qu’il serait trop prétentieux pour ma modeste personne de dire que je maitrise tous les facteurs bloquant la processus de paix. Et je crois qu’aucun autre observateur ou acteur, même ceux qui se disent « observateurs avertis ou experts du conflit en Casamance » ne saura lister tous les facteurs. Cependant par rapport à votre question, je mettrai l’accent sur deux facteurs qui à mon humble avis constituent le principal blocage à l’ouverture d’un dialogue en faveur du retour de la paix en Casamance. C’est l’éclatement du MFDC en plusieurs factions et la multiplicité des groupes ou individus tantôt dénommés médiateurs ou facilitateurs et que je qualifie de « démarcheurs de la paix ».
Pouvez vous Monsieur Bassène, nous expliquer ou commenter un tout petit peu votre allégation?
Bien, je vais essayer. Vous savez que le plus souvent, il est toujours cité ou brandi la division au sein du MFDC comme étant le principal facteur bloquant ou retardant le processus de paix en Casamance. Cette affirmation bien qu’étant réelle ne comporte pas en elle seule la difficulté notée pour réunir les protagonistes autour d’une table de négociation. En réalité la multiplicité des démarcheurs de la paix que d’aucuns caractérisent de colporteurs de la paix demeure le plus grand blocage à mon avis. et comme j’aime à le répéter à chaque fois que l’occasion se présente ;
- ils sont nombreux sur le terrain je veux dire en Casamance et se présentent sous différentes dénominations dont entre autres : groupe, plate forme, association, société civile, espace de dialogue etc. et se définissent comme médiateurs ou tout simplement facilitateurs.
- ils travaillent dans la totale dispersion avec des démarches et approches très différentes les unes des autres (comités vérité réconciliation, mini assises, conférence nationale, sensibilisation etc.)
- ils s’adressent à une seule et même cible qui demeure le MFDC avec des messages très différents
- ils se disent tous préoccupés par un même but qui n’est rien d’autres que le retour de la paix en Casamance.
Sur le terrain chacun se définit comme étant le meilleur et les propos qu’ils tiennent au MFDC et aux leaders d’opinion dans le but de les convaincre et de paraître plus crédibles que les autres colporteurs de la paix sont les suivants :
« Nous ne sommes pas politiques » et cela même s’ils sont quelque part chef de parti ou devenu ministre dans le gouvernement par la grâce de leurs activités politiques.
« L’argent n’est pas au devant de nos préoccupations car dans notre groupe Dieu merci nous avons tous chacun le stricte minimum pour subvenir a nos besoins ainsi qu’à ceux de nos familles », même si on sait de quoi il en est réellement.
« Nous ne cherchons pas à nous enrichir sur le dos des casamançais, et nous condamnons certains qui ne font que sucer le sang des casamançais » même si c’est par ailleurs le cas, car ils ne travaillent pas comme bénévoles.
« Nous ne cherchons ni poste, ni promotion sociale » même si c’est ce qui explique leur rivalité sur le terrain avec les autres démarcheurs.
« Nous sommes venus avec une démarche de rupture car contrairement aux autres venus s’enrichir, nous sommes motivés par notre amour pour la Casamance que nos soyons natifs ou pas de la région et vous proposons une stratégie qui va mettre un terme à la guerre ». Ils le disent avec certitude comme s’ils détenaient la solution miracle du conflit.
Et le comble dans leur façon de faire est que chaque groupe s’affilie à une faction combattante ou politique et la cite dans ses activités comme étant entrain de travailler avec le MFDC le plus souvent sans jamais avoir franchi Mpack.
L’autre astuce consiste à tout faire pour rencontrer même si c’est pour quelques minutes un chef rebelle le temps de prendre des photos et des filmes pour ensuite exhiber les images dans le but de faire croire aux autorités et aux populations qu’ils sont en contact direct avec le MFDC.
Ces démarcheurs de la paix sont entrain de tout « mercantiliser » et puisque les plus puissants d’entre eux parlent au nom du gouvernement ; je me suis qu’ils ont pour mission de marchander et d’acheter la paix en lieu et place de la négocier. Je le dis parce que dans les rencontres leurs discours c’est « si vous accepter de déposer les armes, de renoncer à la guerre et de quitter le maquis, l’Etat vous donne cela ou fait telle grande chose pour vous. Ils sont trop peu à parler de table de négociations pour aboutir à une paix durable. »
A vous entendre on a l’impression que vous êtes contre les acteurs de paix ?
Je ne suis contre de personne. il y a des acteurs comme le Roi d’Oussouye pour ne citer que lui ; qui sont de manière très discrète et sans gros moyens entrain d’abattre un énorme travail de stabilisation et de recherche de paix.
Seulement, je ne partage pas cette façon d’agir de ceux que vous appelez vous autres acteurs de paix. Ceux là connus du grand public comme étant entrain d’aider à ramener la paix en Casamance. Je ne peux pas concevoir cette farouche rivalité qu’ils se livrent sur le terrain. Ces groupes ont tout réussi en Casamance sauf leur mission de contribuer à asseoir les bases d’une paix durable.
Vous aviez également cité plus haut la division du MFDC comme un parmi les facteurs bloquant du processus de paix ?
Oui, et sur ce point l’opinion est unanime que l’éclatement du MFDC a rendu plus que difficile la possibilité de pouvoir dialoguer. Le Mouvement comporte de nos jours plusieurs chefs, dont trois chefs d’état-major auto proclamés et plusieurs prétendants au titre de secrétaire général. Tout comme les démarcheurs de la paix, les chefs du MFDC pour être crédibles aux yeux des sympathisants s’accusent mutuellement de corrompus par l’Etat sénégalais. Ils se rivalisent et chacun cherche à se positionner comme l’interlocuteur incontournable pour arriver a la paix.
Mais de ce coté, les choses sont très positivement entrain d’évoluer. Le MFDC conscient que cette dispersion est en leur défaveur est entrain de mener des démarches dans le sens d’une unification ou une unité autour de l’essentiel. De nos jours les différentes factions politiques internes se fréquentes et se parlent et il en est de même pour l’aile combattante avec des contacts très positifs entre César et Compass et avec même Ansoumana Sambou dit Lamarana qui il y a quelques semaines s’était démarqué du commandement de César a travers un communiqué radiodiffusé. Des démarches sont entrain d’être menées en direction de Salif Sadio dans ce même sens.
Présentement ; ils sont entrain de s’organiser pour arriver à des assises à l’issue des quelles, ils se trouveront un leader ou désigneront un groupe d’individus de façon consensuelle et qui feront face au gouvernement du Sénégal à la table de négociations. Je souhaite vivement qu’ils en arrivent à ce stade.
Et je lance un appel aux démarcheurs de la paix de suivre l’exemple du MFDC en se retrouvant autour de l’essentiel et en cherchant à harmoniser leur positions. Car il ne faudrait surtout pas qu’ils brisent l’unité qui est entrain d’être retrouvée au sein du MFDC. Ils doivent plutôt les aider à s’unir afin que puisse s’ouvrir des négociations sérieuses en vue d’une paix définitive en Casamance.
ARDiallo
alfonsedelatroncheenbiere
Pas mal, mais peu faire mieux, avec de la bouteille cela devrait être prometteur.
Invictus Felix à méditer