Monde / France: les points d’achoppement dans les négociations sur le climat
Du caractère contraignant du futur accord jusqu’à ses objectifs même, des points de dissension majeurs restent à résoudre à Paris si la communauté internationale veut parvenir à un pacte permettant de limiter le réchauffement de la planète.
– Objectifs de l’accord –
En 2009 à Copenhague, les Etats se sont accordés pour limiter la hausse de la température à +2°C par rapport aux niveaux pré-industriels, ce qui impose de limiter drastiquement les émissions de gaz à effet de serre (GES).
Mais les désaccords sont profonds sur la manière d’y parvenir. Fixe-t-on un objectif global daté (par exemple réduire de 40 à 70% les émissions d’ici 2050, comme le préconise la science)? Et une trajectoire pour l’atteindre?
Pointe-t-on le rôle des énergies fossiles’ Ou préfère-t-on des formulations floues (favoriser des politiques bas carbone), laissant une large marge de manoeuvre aux signataires.
En outre, de nombreux pays, notamment les plus menacés comme les petites îles, militent pour limiter le réchauffement à 1,5°C. Enfin, pour rester sous 2°C, scientifiques et économistes recommandent davantage d’efforts avant 2020, année d’entrée en vigueur de l’accord. Les mesures avant 2020 feront donc aussi partie des négociations.
– La révision à la hausse des engagements –
Quelque 161 pays ont à ce jour publié leurs plans pour limiter leurs émissions à horizon 2025 ou 2030. Une participation remarquable. Sauf que ces promesses, définies librement par chacun, sont insuffisantes: même si elles étaient tenues, la hausse du mercure serait ramenée de plus de 4°C à environ 3°C en 2100.
Pour rester à +2°C, de plus en plus de pays voudraient une révision à la hausse des engagements, tous les cinq ans. Mais au-delà de ce principe, calendrier et contenu restent un point dur des négociations: Comment évaluer les progrès réalisés’ Dès avant 2020? – Financements, coopération – En 2009, les pays riches, responsables historiques du réchauffement, ont promis 100 milliards de dollars par an dès 2020 pour financer les politiques climatiques des pays en développement, qui avec l’accord de Paris vont pour la 1re fois s’engager à réduire leurs émissions.
Mais les destinataires demandent que cette somme soit revue à la hausse après 2020. Ils souhaitent aussi que la part des dons augmente pour financer leurs énergies propres, mais aussi les mesures leur permettant de résister aux effets déjà ressentis du réchauffement (sécheresses, inondations, montée des océans etc).
Les pays industrialisés souhaitent cependant que les pays émergents, dont la Chine, désormais premier pollueur mondial, participent. Mais Pékin veut garder un accord strictement fondé sur la division pays développés/en développement instaurée en 1992 par la convention-cadre de l’ONU sur le climat.
Même s’il a annoncé en septembre une aide de 3,1 mds USD aux politiques climatiques des pays du Sud. Outre les financements, ces derniers réclament des transferts de technologies.
Certains souhaitent enfin que soient prévus des pertes et dommages pour compenser les préjudices subis. – Forme juridique et caractère contraignant – Les pays se sont mis d’accord en 2011 à Durban pour aboutir en 2015 à un protocole, un autre instrument légal ou une solution concertée ayant une force légale, ce qui laisse les options ouvertes.
Et depuis il y a eu peu de discussions. S’agira-t-il d’un traité, ou d’un protocole, nécessitant ratification par les Parlements (comme le protocole de Kyoto dont l’accord de Paris est censé prendre le relais)? Ou d’une simple déclaration politique?
Washington a déjà indiqué que ça ne pourrait être un traité, qui impliquerait une ratification par un Congrès républicain peu acquis à la cause du climat.
Quel statut juridique auront les promesses nationales de réduction des GES, qui sont à ce stade des contributions, terme qui a remplacé en 2013 le mot engagement pour rallier tous les pays’ Seront-elles en annexes, ou totalement séparées de l’accord’ Quel sera le mécanisme de suivi et de contrôle?
Dans tous les cas, il n’y aura pas de mécanisme de sanctions. La contrainte, ce sera l’engagement international, l’obligation de transparence, l’effet sur la réputation, résume la négociatrice française Laurence Tubiana.
AFP / Ibou Camara