Casamance : Aline Sitowé Diatta, l’inébranlable Reine de la Résistance Casamançaise
La résistance en Casamance, durant la Seconde Guerre mondiale, fut un mouvement d’une ampleur exceptionnelle, mobilisant hommes, femmes, et enfants contre l’oppression coloniale. À travers les épreuves imposées par la France, notamment cinq impôts – argent, miel, caoutchouc, riz et bétail – ainsi que des corvées écrasantes, la région se révolta sous l’influence d’une figure charismatique : Aline Sitowé Diatta. Celle-ci incarnait l’âme de la résistance, faisant écho aux profondes souffrances du peuple face aux exigences coloniales, notamment la capture absurde de mouches tsé-tsé vivantes, à rapporter dans des bouteilles.
L’Éveil d’une Héroïne
Aline Sitowé Diatta, née à Cabrousse en Casamance, était une simple domestique à Dakar lorsqu’elle reçut, selon ses dires, des messages divins lui confiant la mission de libérer son peuple. Loin de se plier facilement à cette tâche, elle tenta de s’y soustraire, mais son destin l’appelait avec une force irrésistible. Elle retourna finalement à Cabrousse pour accomplir sa mission, prêchant la résistance contre l’oppression coloniale. Poursuivie par les autorités françaises, elle finit par se livrer, préférant protéger son village de la destruction. Déportée d’abord à Saint-Louis, puis à Tombouctou, elle ne cessa de marquer les esprits.
Un Message Pluridimensionnel
Le message d’Aline Sitowé transcendait les aspects purement politiques et touchait à toutes les dimensions de la vie : religieuse, culturelle, sociale, économique et politique.
a) Le Message Religieux
Aline Sitowé prônait un retour aux racines religieuses ancestrales, en conservant intactes les pratiques animistes, notamment le respect de la semaine traditionnelle de six jours. Ce message spirituel visait à protéger la liturgie animiste transmise de génération en génération. Elle insistait également sur le respect de la hiérarchie religieuse traditionnelle, considérée comme la gardienne de l’ordre cosmique.
b) Le Message Culturel
La préservation de l’héritage culturel était au cœur de son combat. Elle encourageait la réhabilitation des valeurs culturelles : les proverbes, chants, arts et coutumes devaient être maintenus et honorés. Cependant, elle ne s’opposait pas à l’assimilation d’apports extérieurs, à condition qu’ils soient positifs et n’érodent pas l’identité casamançaise.
c) Le Message Social
Aline Sitowé prêchait une égalité universelle, abolissant toute forme de discrimination, qu’elle soit basée sur le sexe, la race ou la religion. Son message d’amour, d’entraide et de solidarité trouvait écho dans des pratiques communautaires comme les repas partagés lors des sacrifices pour la pluie. L’hospitalité, une valeur clé dans les sociétés africaines, était également mise à l’honneur.
d) Le Message Économique
Elle s’attaquait directement aux politiques agricoles coloniales, en particulier à la monoculture de l’arachide, qu’elle qualifiait de « nourriture d’esclaves ». Elle dénonçait l’impact environnemental désastreux de cette culture, responsable de la déforestation et de l’avancée du désert. Elle exhortait son peuple à revenir aux cultures traditionnelles diversifiées – riz, manioc, patate douce, fonio – et à économiser le riz, pressentant des temps de sécheresse à venir.
e) Le Message Politique
Sur le plan politique, Aline Sitowé était en conflit ouvert avec les autorités françaises. Alors que la France, coupée de ses colonies asiatiques, réquisitionnait le riz de Casamance pour nourrir les troupes stationnées à Dakar, elle appelait à l’économie de cette ressource précieuse pour affronter les périodes de sécheresse. Elle s’opposait également à la culture forcée de l’arachide, imposée par la cravache et la prison.
Une Prophétie de Libération
Aline Sitowé Diatta n’était pas seulement une résistante ; elle était aussi une prophétesse. Elle prédisait un futur où les colonisateurs quitteraient le pays et où les Casamançais seraient libérés des impôts et des corvées imposés par le colon. Elle annonçait que l’arachide, autrefois imposée comme une culture lucrative, finirait par ne plus se vendre. Ses paroles résonnaient comme un espoir inébranlable pour son peuple.
Un Exil Injuste et un Retour Attendu
Le 29 janvier 1943, Aline Sitowé fut déportée à Tombouctou, où elle trouva la mort. Depuis ce jour, ses compatriotes n’ont cessé de demander le retour de ses dépouilles en Casamance. Cette demande fut portée jusqu’au président Léopold Sédar Senghor, sans succès. En 1980, l’abbé Augustin Diamacoune Senghor réitéra cet appel lors d’une conférence, suscitant l’intérêt de la Croix-Rouge Internationale. Toutefois, une délégation de cette organisation fut refoulée en 1981 à Dakar. Jusqu’à présent, aucune des autorités sénégalaises successives de Léopold Sédar Senghor, à Bassirou Diomaye Diakhar Faye, en passant par Abdou Diouf, Abdoulaye Wade et de Macky Sall n’a accordé l’attention nécessaire au rapatriement des restes de cette figure historique.
L’Héritage de la Reine de Casamance
Aline Sitowé Diatta est plus qu’une héroïne de la résistance ; elle incarne l’esprit indomptable de la Casamance. Bien que son combat ait été vaincu temporairement par les colons français, son message continue de résonner à travers les âges. Son appel à la liberté, à la préservation des traditions et à la solidarité reste une source d’inspiration pour les générations actuelles et futures.
Les Casamançais, fidèles à leur Reine, n’abandonneront jamais leur rêve de voir ses restes rapatriés du désert de Tombouctou. L’histoire d’Aline Sitowé Diatta est celle d’une lutte pour la dignité et l’émancipation, et son souvenir restera gravé dans les mémoires comme un symbole de courage et de résistance.
Antoine Bampoky
sitowe2000
« L’histoire d’Aline Sitowé Diatta est celle d’une lutte pour la dignité et l’émancipation, et son souvenir restera gravé dans les mémoires comme un symbole de courage et de résistance. »
LA REINE DE LA CASAMANCE RETOURNERA VIVE OU MORT SUR LA TERRE DE SON ROYAUME. ELLE A ETE ABANDONNEE PAR LE SENEGAL, MAIS LA CASAMANCE INDEPENDANTE ACHEVERA L’HUMBLE MISSION