Casamance : Une étape cruciale dans la quête de justice pour René Capain Bassène et Oumar Ampoï Bodian
L’affaire Boffa-Bayotte a captivé l’attention du public depuis ses débuts, non seulement en raison de la tragédie qui l’a déclenchée, mais aussi à cause des nombreuses zones d’ombre entourant les accusations et les condamnations initiales. Le récent rebondissement dans le procès en appel, où le procureur a requis, le jeudi 25 juillet 2024, l’acquittement de René Capain Bassène et Oumar Ampoï Bodian pour les accusations de participation à un mouvement insurrectionnel et de sortie irrégulière de correspondances, marque un tournant significatif dans cette affaire complexe.
René Capain Bassène, journaliste reconnu, et Oumar Ampoï Bodian, un éminent du mouvement indépendantiste casamançais MFDC, autre accusé clé, ont vu leur situation juridique évoluer de manière substantielle grâce à cette demande d’acquittement. Cette évolution n’est pas seulement une victoire pour les avocats de la défense, mais elle reflète aussi un moment crucial où le système judiciaire semble reconnaître certaines des lacunes, des faiblesses et des incohérences des charges initiales.
La déclaration du procureur, Théophile Topin, lors de la deuxième journée d’audience a résonné comme un souffle de soulagement pour les accusés et leurs soutiens. En requérant l’acquittement, le procureur semble reconnaître l’absence de preuves convaincantes pour soutenir ces accusations spécifiques. Cette reconnaissance est d’autant plus importante dans un contexte où les condamnés avaient été, en première instance et sous le régime sénégalais anti-casamançais de Macky Sall, lourdement sanctionnés par une peine de réclusion criminelle à perpétuité.
Maître Clédor Ciré Ly, l’avocat de la défense, n’a pas caché sa satisfaction face à cette nouvelle donne. Ses mots, « C’est un beau procès où le droit a été dit aussi bien au niveau de l’accusation qu’au niveau de la défense », témoignent de l’importance de ce moment où la justice semble enfin faire preuve de discernement et de rigueur.
Cependant, il est crucial de rappeler que les accusés ne sont pas encore totalement libérés de leurs charges. Ils restent inculpés d’association de malfaiteurs et de participation à un assassinat. Le verdict final, attendu le 29 août, sera déterminant pour leur avenir. Cette date marquera-t-elle la fin de leur calvaire judiciaire ou prolongera-t-elle encore leur incertitude et celle de toute la Casamance qui se voit au banc des accusés ?
L’affaire de la forêt de Boffa-Bayotte n’est pas seulement une question de justice pour les victimes et leurs familles, mais aussi un test de la robustesse et de l’équité du nouveau système judiciaire sénégalais en Casamance. La manière dont cette affaire est traitée a des implications profondes pour la confiance des Casamançais dans les institutions judiciaires sénégalaises.
Il est impératif que le verdict final du 29 août reflète non seulement la vérité des faits, mais aussi une justice équitable et impartiale, surtout pas une justice du colon contre le colonisé. Les « erreurs » judiciaires sont malheureusement trop fréquentes, et chaque cas où la vérité est rétablie est une victoire pour l’État de droit.
Alors que nous nous rapprochons de cette date cruciale, il est essentiel de maintenir une vigilance constante et d’exiger que chaque étape de la procédure respecte les principes fondamentaux de justice. Seule une justice transparente et équitable peut redonner espoir à ceux qui se battent pour leur innocence et renforcer la confiance dans les institutions qui sont censées les protéger.
Après les dénis de procès sur le naufrage du bateau Le Joola, sur les assassinats de personnalités politiques casamançaises comme le professeur Victor Ehuméhemba Diatta, le président du Conseil régional de Ziguinchor El-Hadj Oumar Lamine Badji, d’Abdou Elinkine Diatta, sur les tueries de jeunes manifestants à Ziguinchor, à Diaobé, à Médina Gounasse, à Kolda, Bignona, Kédougou, sur les assassinats de Fulbert Sambou, Didier Badji, Mariama Sagna et François Mancabou, sur l’affaire Adji Sarr, alors le procès en appel sur la tuerie dans l’affaire de la forêt de Boffa-Bayotte, nous rappelle à quel point, la justice est un pilier fragile mais essentiel de notre société.
L’acquittement requis pour René Capain Bassène et Oumar Ampoï Bodian est une avancée positive, mais le combat pour la vérité et l’équité continue. Le 29 août 2024 sera une date décisive non seulement pour les accusés, mais aussi pour le nouveau système judiciaire sénégalais dans son ensemble.
Que la vérité et la justice, dans toute leur splendeur, triomphent enfin en Casamance.
Antoine Bampoki