AES : Crise diplomatique entre le Sahel et l’Algérie : L’AES affirme sa souveraineté dans une nouvelle ère panafricaine

Une nouvelle page des relations interafricaines est en train de s’écrire, et elle se veut déterminée, souveraine et résolument tournée vers l’autodétermination.
Le Dimanche 6 avril, les pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES) – le Mali, le Niger et le Burkina Faso – ont conjointement rappelé leurs ambassadeurs en poste à Alger, en réaction à ce qu’ils qualifient « d’acte d’agression inédit » de la part de l’Algérie.
L’incident qui a mis le feu aux poudres ? L’abattage d’un drone malien par les forces algériennes, un appareil tombé à moins de dix kilomètres de la frontière, mais toujours en territoire malien selon Bamako. Loin d’être un simple incident technique, cet acte est interprété par l’AES comme une atteinte à leur souveraineté, un affront qui ne saurait rester sans réponse.
Une réaction panafricaine unie
Le communiqué commun publié par les trois capitales sahéliennes est historique : jamais auparavant ces nations, souvent perçues à travers le prisme de l’instabilité ou des interventions extérieures, n’avaient affiché une telle unité diplomatique et stratégique. Loin des logiques de dépendance qui ont trop souvent défini les relations africaines, l’AES s’impose comme une voix nouvelle, libre et forte au cœur du continent.
Ce rappel collectif des ambassadeurs ne saurait être réduit à une simple formalité diplomatique. Il traduit une volonté profonde de redéfinir les règles du jeu régional, de sortir des logiques verticales où certains États africains se sentent en droit de dicter leur conduite à d’autres sous couvert de stabilité ou de coopération sécuritaire.
Une souveraineté non négociable
Depuis leurs ruptures avec les anciennes puissances coloniales et le recentrage de leurs priorités autour de la souveraineté, du développement endogène et de la sécurité populaire, les États de l’AES ont affirmé un cap : celui de la dignité retrouvée. Ce dernier incident, loin de les affaiblir, semble au contraire renforcer leur cohésion et leur détermination à ne plus être les figurants d’un théâtre géopolitique qu’ils ne contrôlent pas.
Dans son communiqué, le ministère malien des Affaires étrangères n’y va pas par quatre chemins : il s’agit d’un « acte hostile, inamical et condescendant ». Le Mali a convoqué l’ambassadeur d’Algérie pour protester officiellement et s’est immédiatement retiré du Comité d’État-major conjoint (CEMOC), jusque-là symbole d’une coopération sécuritaire régionale dont l’efficacité restait questionnée.
L’heure du panafricanisme concret
Ce tournant marque aussi un moment fort pour le panafricanisme contemporain. Loin des discours incantatoires, les États du Sahel donnent corps à une vision politique où la solidarité africaine ne se limite pas à des slogans. Elle se traduit par des actes concrets : défense collective de la souveraineté, coopération militaire entre pays frères, affirmation d’un nouveau projet politique continental, affranchi des tutelles, mais enraciné dans les réalités africaines.
Il serait tentant, du côté d’Alger comme d’autres capitales, de minimiser cette crise comme une réaction épidermique. Ce serait une erreur stratégique. Car l’AES n’est pas seulement une alliance militaire ou politique, c’est désormais un symbole de résistance à l’ingérence, qu’elle vienne du Nord ou du Sud. Elle incarne une Afrique debout, qui parle d’égal à égal, y compris à ses voisins.
Pour une Afrique des peuples
À l’heure où les peuples africains réclament plus de justice, plus de souveraineté et plus de solidarité réelle entre États africains, l’unité affichée du Mali, du Burkina Faso et du Niger envoie un message fort : celui d’un continent qui prend son destin en main, sans arrogance, mais avec une détermination inébranlable. Cette crise, loin d’annoncer une fracture, pourrait bien ouvrir la voie à une refondation des relations africaines, basée non sur la méfiance ou la hiérarchie, mais sur le respect mutuel et la coopération authentique.
L’Afrique de demain se construit aujourd’hui. Et les peuples du Sahel viennent de rappeler, avec clarté, qu’ils ne seront plus les spectateurs, mais bien les architectes de leur avenir commun.
Saliou Cissé
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