Casamance : Discours du 31 décembre 2024 du président sénégalais Bassirou Diomaye Faye, encore une promesse de paix. Faut-il croire ?
La confiance des Casamançais envers leurs dirigeants sénégalais a toujours été mise à l’épreuve, notamment en ce qui concerne la résolution du conflit en Casamance. Depuis l’indépendance du Sénégal en 1960, chaque président a fait des promesses ambitieuses pour la paix, mais aucune n’a abouti à une solution. Aujourd’hui, le Président Bassirou Diomaye Faye, porté au pouvoir en avril 2024, fait face à une défiance croissante, notamment en Casamance, où ses déclarations et actions sont scrutées avec scepticisme.
L’histoire politique du Sénégal est marquée par des promesses non tenues envers la Casamance. De Léopold Sédar Senghor à Macky Sall, chaque président a échoué à résoudre ce conflit vieux de plusieurs décennies.
Léopold Sédar Senghor (1960-1980) : En promettant l’indépendance après son discours politique à Sédhiou, il a plutôt consolidé son pouvoir au mépris des dirigeants casamançais, ce qui a exacerbé les tensions. L’assassinat du fondateur du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (MFDC) en 1947, Victor Emuhemba Diatta, n’a fait qu’envenimer la situation.
Abdou Diouf (1981-2000) : Sa stratégie militaire brutale a engendré des pertes humaines considérables sans pour autant affaiblir le MFDC.
Abdoulaye Wade (2000-2012) : Promettant de résoudre le conflit en 100 jours, il a quitté le pouvoir sans avoir initié un processus de paix crédible, allant jusqu’à financer des milices contre les civils casamançais.
Macky Sall (2012-2024) : Malgré ses déclarations à Bignona en faveur de l’intégration de la Casamance dans le Sénégal, son règne de 12 ans n’a pas vu de progrès significatif vers la paix.
Cet héritage de promesses non tenues a créé un climat de méfiance profond envers les dirigeants sénégalais, notamment en Casamance.
Bassirou Diomaye Faye : Un nouveau départ ou une continuité décevante ?
Lors de sa campagne électorale, Bassirou Diomaye Faye a suscité l’espoir en promettant de célébrer sa victoire et son anniversaire à Cap-Skirring, en Casamance. Cependant, une fois élu, il n’a même pas mentionné la région dans son premier message à la nation, laissant ses électeurs casamançais perplexes et déçus.
Dans son discours du 31 décembre 2024, le Président Faye a enfin évoqué la Casamance, annonçant le Plan Diomaye pour la Casamance (PDC). Ce plan vise à accompagner le retour des populations déplacées et à soutenir le processus de paix. Cependant, plusieurs questions se posent :
La priorisation réelle de la paix : Pourquoi la Casamance n’a-t-elle pas été mentionnée dès son premier discours ? Cette omission renforce le sentiment que la région n’est pas une priorité.
Le timing du Plan Diomaye : Planifier le retour des réfugiés avant même l’aboutissement du processus de paix semble prématuré, voire irréaliste. Comment garantir la sécurité des populations dans un contexte de conflit non résolu ?
La crédibilité des engagements : Après des décennies de promesses non tenues, les Casamançais sont naturellement sceptiques. Le Plan Diomaye sera-t-il différent des initiatives précédentes, ou simplement une nouvelle déclaration d’intentions ?
Une défiance ancrée dans l’histoire et la réalité actuelle :
En Casamance, la défiance envers les présidents sénégalais est profondément enracinée. Les populations locales estiment que l’État a cherché à « sénégaliser » la région en imposant une administration et une armée centralisées, tout en effaçant l’histoire résistante de la Casamance. Cette marginalisation politique et culturelle a alimenté le sentiment d’abandon et renforcé le soutien au MFDC.
Aujourd’hui, malgré les annonces du Président Faye, peu de Casamançais croient en une réelle volonté politique de résoudre le conflit. Les actions concrètes manquent, et les déclarations semblent souvent déconnectées des réalités sur le terrain.
La baisse de confiance envers le Président Bassirou Diomaye Faye est le reflet d’un héritage politique marqué par des promesses non tenues et une gestion coloniale du pouvoir. Pour regagner la confiance des Casamançais, le Président Faye doit aller au-delà des discours et mettre en œuvre des actions concrètes.
Le Plan Diomaye pour la Casamance pourrait être un pas dans la bonne direction, mais il doit s’accompagner d’un engagement transparent, d’un dialogue inclusif avec toutes les parties prenantes, et d’une reconnaissance de l’histoire et des aspirations de la Casamance. Sans cela, les déclarations du Président risquent de rester lettre morte, et la défiance de s’accroître davantage.
La question demeure : Faut-il croire en Bassirou Diomaye Faye ? La réponse dépendra de sa capacité à transformer ses promesses en actions tangibles et à rompre avec les échecs du passé.
Pierre Coly
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