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Casamance : Extrait (2) de la conférence de l’Abbé Augustin Diamacoune Senghor tenue à la Chambre de Commerce de Dakar le samedi 23 août 1980

Casamance : Extrait (2) de la conférence de l’Abbé Augustin Diamacoune Senghor tenue à la Chambre de Commerce de Dakar le samedi 23 août 1980

Ce que je sais, moi, c’est que Blaise DIAGNE a délibérément ignoré le fait de la résistance armée du peuple Casamançais ainsi que les méthodes esclavagistes de recrutements des noirs pour le front. Il a osé cautionner ce recrutement qui s’est poursuivi avec ses méthodes esclavagistes jusqu’en 1924.

Tout cela malgré les vives protestations du père Jean Marie ESVAN souvent inquiété par l’administration coloniale pour ses activités qualifiés d' » anti-française » par les hauts fonctionnaires de l’époque.

Rappelons simplement que : condamné à cent Francs d’amende et en un mois d’emprisonnement le 15 Janvier 1915, par l’administrateur de COPPET, de sinistre mémoire, le brave père ESVAN ne dû sa libération, avant son acquittement après appel par les tribunaux de Dakar le 26 Mars 1915, qu’à un mouvement populaire comme Ziguinchor en a le secret, qui fit trembler de COPPET, ce colonialiste à la fois anticlérical et franc-maçon notoire.

Je poursuis, le 6 Mars 1918 : Blaise DIAGNE rend visite à la mission catholique de Ziguinchor et promet au père ESVAN, qui demeure sceptique d’ailleurs, et pour cause, que « désormais le recrutement se fera en douceur « . Promesse de Député, bien sûr ! Nous sommes dans un pays ou le Député qui ne promet pas n’est pas un bon Député. Les événements donnèrent raison au père ESVAN.

On me dit que Blaise DIAGNE a beaucoup fait pour les «  Tirailleurs Sénégalais » en France mais nous connaissons les difficultés rencontrées par un pauvre Charles NTCHORERE, né sujet français pour la confirmation de ses différents grades, de 1917 à 1927.

De nos jours, nos anciens combattants luttent encore pour obtenir du gouvernement Français une égalité de traitement avec leurs camarades métropolitains dans le versement des pensions. Bref… Donc, pendant que la Casamance, selon l’expression même du gouverneur général CLOZEL, véritable « exception et un anachronisme dans l’ ensemble des territoires français« , menait vaillamment sa lutte de résistance à l’administration coloniale, des Africains d’Afrique, à commencer par Blaise DIAGNE, tout noir de peau du moins, se prévalant de la citoyenneté française et du patriotisme français, concouraient aussi à la chasse à l’homme, et aidaient les Français à nous casser la figure, pour employer un terme moins militaire.

Tout cela, au nom de la France, contre l’Afrique en général, et contre la Casamance en particulier. En effet, le blanc venait et « bouclait » les villages avec la troupe. On se livrait à une véritable chasse à l’homme. Tous ceux que l’on jugeait aptes étaient immédiatement internés dans la prison civile d’OUSSOUYE par exemple : c’est le cas qui nous concerne de plus près de cette causerie. Quand on avait atteint le quota exigé, on arrêtait les visites. On pénétrait dans la prison. On alignait les recrues. On leur passait des cordes aux chevilles, à la ceinture et au cou. On prenait, bien sûr, le soin de relier ces futurs soldats les uns aux autres. Ensuite, cravache à la main, on les forçait à marcher ainsi, à la file indienne de OUSSOUYE à KAMOUBEUL ! Soit une distance d’environ vingt kilomètres, à pied !

Et je vous prie de croire que les gardes ne récitaient pas des  » je vous salue, Marie », en chemin. Par contre, les mamans qui suivaient le cortège pouvaient reprendre à leur compte ce verset de l’écriture : « Ô vous tous qui passez sur la route, arrêtez-vous et voyez si votre douleur est comparable à la mienne ». (Jérémie, Première Lamentation, Verset 12).

Les parents accompagnaient ces captifs d’un nouveau genre, en criant et en pleurant jusqu’à la rivière « SIBUY« , c’est à dire donc jusqu’au bac de Kamoubeul. Là se déroulaient des adieux déchirants : car l’expérience a montré que la plupart de ces recrues ne revenaient pas de la guerre. Rappelez-vous la 17ème compagnie de Bignona commandée par le capitaine JAVELIER et lieutenant LEMOINE entièrement décimée à Arras, dans le Nord de la France. Oui, ce procédé de capture et d’enrôlement des recrues n’était pas sans rappeler le contexte de la traite des nègres. Capturé de la même façon, finalement, l’on partait pour ne plus revenir :  » Nous élevons nos enfants jusqu’à l’âge adulte, et les blancs viennent nous les ravir pour en faire des soldats « !

Ainsi gémi la complainte bien connue de nous tous ! Qu’elle soit Diola, Mandiaku, Mankagne, Balante, Mandingue, Baïnunka, Peul ou autre, cette Femme qui se lamente, c’est la Casamance qui pleure ses Enfants et ne veut pas être consolée car ils ne sont plus. C’est cette Casamance à la fois généreuse et jalouse du Sang de ses Enfants. Malheur à celui par le sang d’un Fils de la Casamance aura été versé !

Oui, un frère de mon père est tombé dans la rizière de Karunat sous les balles françaises, quand ce village, en pleine résistance active, fit échouer le recrutement organisé en décembre 1915. Aperçu en train de fuir sans armes vers son village d’origine, il fut froidement abattu par la soldatesque.

Oui, un autre frère de mon père, recruté dans les conditions que l’on sait, est tombé pour la France, durant la grande guerre, sous les balles allemandes, au pays des blancs.

Plus tard, un de mes cousins, épargné par les balles allemandes, est tombé à Thiaroye sous les balles françaises, le 28 Mars 1944.

Un autre cousin, Germain est tombé en 1952, sous les balles du VIETMINH, en Indochine Française. Et c’est toujours au nom de la France qu’on demande ce tribut à la Casamance.

La France de Blaise DIAGNE ! « LA CASAMANCE A SES MORTS POUR LA FRANCE« , disait l’inscription du monument aux morts érigé là où, ironie du sort, en 1927, des fils du Kassa, faussement accusés, ou inculpés sans preuves suffisantes, sont tombés sous les balles de l’Administrateur MAUBERT en clamant leur innocence malgré l’intervention du Père ESVAN, encore lui, qui intervint encore sans succès pour obtenir la libération de la Reine Aloendiso BASSENE.

En bon Français, le Casamançais authentique appelle chat un chat et Blaise DIAGNE un traître, un collaborateur et un colonialiste. Pour lui, claironner en Casamance le Centenaire de la Naissance de Blaise DIAGNE est une provocation impardonnable.

Ces clarifications non seulement importantes, mais encore obligatoires étant effectuées, achevons rapidement notre petit panorama historique destiné à mieux situer le message de la Reine ALINE SITOE dans le contexte Casamançais de l’époque et de toujours. En 1920 précisément : Fin de la Résistance Active en Casamance, pour 20 ans du moins. Date approximative également de la naissance de celle qui sera une vingtaine d’années plus tard la Reine Aline Sitoé DIATTA de Cabrousse.

En Avril 1931 : Mort à 85 ans environ à KanseKunda, en Gambie, où il fut enterré, de Moussa MOLO BALDE, puissant Roi du Fouladou.

En 1940 : défaite de la France. Appel du 18 juin 1940 du Général de GAULLE. Mais aussi « Vocation » d’ALINE SITOE DIATTA qui se dit chargée par le ciel de transmettre un « message » du ciel aux hommes de tous les temps et de tous les lieux, mais particulièrement à ses Compatriotes de Casamance.

Kondiarama (Extrait numéro 2 de la conférence du 23 août 1980 de l’Abbé Augustin Diamacoune Senghor 23 août 1980)

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