Casamance : Quand Dakar Dem Dikk vide la poches des Casamançais déjà démunis

Hier, mercredi 19 mars 2025, Dakar Dem Dikk (DDD) a lancé en grande pompe sa nouvelle ligne de bus reliant Ziguinchor à Cap Skirring, un trajet de 50 kilomètres présenté comme une avancée pour la Casamance. Mais derrière les discours lisses et les promesses de « modernité », une réalité amère éclate au grand jour : un tarif exorbitant de 5 000 FCFA, imposé sans vergogne à une population parmi les plus pauvres du Sénégal. Alors que les autorités vantent un service « fiable » et « confortable », les Casamançais, eux, y voient une nouvelle preuve de l’indifférence de Dakar à leur égard. Cet article n’est pas qu’un cri d’alarme : c’est un réquisitoire contre une exploitation financière qui doit cesser.
Un tarif qui étrangle les plus démunis
Thierno Seydou Diop, secrétaire général de DDD, a qualifié ce tarif de 5 000 FCFA de « raisonnable », invoquant le coût du confort et de la ponctualité. Mais raisonnable pour qui ?
Dans une province ravagée par quarante-trois ans de conflit, d’isolement et de sous-investissement, où le revenu moyen des ménages suffit à peine à nourrir une famille, ce prix est une insulte. Les transporteurs locaux, eux, proposent le même trajet pour 2 000 à 2 500 FCFA. Pourquoi une entreprise publique, censée incarner le service au peuple, impose-t-elle un coût deux à trois fois plus élevé, hors de portée pour la majorité ?
DDD prétend éviter une « concurrence déloyale » avec les privés. Cet argument est un écran de fumée. Si l’objectif était vraiment d’équilibrer le marché, pourquoi ne pas subventionner cette ligne pour la rendre accessible, ou instaurer une tarification progressive adaptée aux réalités locales ? La vérité, c’est que ce tarif ne sert ni les Casamançais, ni les transporteurs locaux, mais les caisses de DDD et les priorités de Dakar. Pendant ce temps, les habitants restent prisonniers d’un système où même les prétendues « solutions » les excluent.
Confort et fiabilité : un luxe imposé aux dépens du peuple
Les bus partent à l’heure, même à moitié vides, et offrent un « confort supérieur« . Belle vitrine ! Mais à qui s’adresse ce luxe ? Aux touristes débarquant à Cap Skirring et aux élites locales, pas aux paysans, artisans ou étudiants de Ziguinchor et des villages voisins. Comparer cette ligne au bateau Aline Sitoé Diatta est une farce : dans une Casamance où l’accès à l’eau potable, à l’éducation ou à la santé reste un combat quotidien, imposer un service haut de gamme à 5 000 FCFA n’est pas un progrès, c’est une provocation. Les Casamançais ne réclament pas du bus dernier cri ; ils veulent un transport abordable qui les sorte de l’enclavement.
Un modèle économique qui sacrifie la Casamance
DDD justifie ce tarif par la nécessité de couvrir 50 % de ses investissements. Mais pourquoi cette rentabilité doit-elle peser sur les épaules d’une région déjà exsangue ? Une entreprise publique ne devrait-elle pas être soutenue par l’État pour desservir une zone stratégique comme la Casamance, avec son potentiel agricole et touristique ?
Au lieu de cela, Dakar traite la Casamance comme une vache à lait, un terrain d’expérimentation pour des projets déconnectés. Si une baisse des prix menace les transporteurs locaux, pourquoi ne pas les intégrer dans un partenariat gagnant-gagnant, ou créer un fonds de compensation ? Ces solutions existent, mais elles demandent une volonté politique que Dakar n’a jamais eue pour la Casamance.
Une modernisation qui cache un mépris
Présenter cette ligne comme une « vision » ou une « modernisation » est une mascarade. Oui, la Casamance a besoin d’infrastructures, mais pas d’un développement élitiste qui ignore ses habitants. Les indépendantistes et les défenseurs des droits locaux le martèlent depuis des décennies : les décisions imposées par Dakar, sans consultation, ne font qu’alimenter la fracture. La communication bâclée de DDD, admise même par ses soutiens, n’est que le symptôme d’un mal plus profond : un mépris chronique pour les aspirations des Casamançais.
Un ultimatum : un transport pour le peuple, ou rien
Cette ligne Ziguinchor-Cap Skirring ne doit pas être une vitrine pour DDD ni un privilège pour quelques-uns. Elle doit devenir un levier de justice sociale.
1. Une baisse immédiate du tarif à 2 500-3 000 FCFA, financée par une subvention de l’État dans le plan Diomaye pour la Casamance.
2. Un partenariat équitable avec les transporteurs locaux pour un service complémentaire.
3. Une consultation populaire pour écouter – enfin – ce que veulent les Casamançais.
La Casamance n’est pas une colonie intérieure à exploiter. Elle mérite une paix juste et un développement qui la sert, pas qui la saigne. Si Dakar Dem Dikk et les autorités restent persistantes dans cette voie, qu’ils ne s’étonnent pas de voir la colère d’un peuple trop longtemps ignorée exploser. Le temps des faux-semblants est révolu.
Moussa Moïse Djiba (M2D)
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