Dans un geste inattendu mais salué de part et d’autre de l’échiquier politique, l’administration Trump a annoncé mardi une réforme majeure de la réglementation alimentaire : l’interdiction progressive de l’ensemble des colorants artificiels encore autorisés aux États-Unis. Cette mesure, qualifiée d’« historique » par plusieurs experts de santé publique, marque un tournant dans la politique sanitaire américaine.

C’est Marty Makary, récemment nommé à la tête de la Food and Drug Administration (FDA), qui a présenté cette décision lors d’une conférence de presse. « La FDA supprime de facto tous les colorants alimentaires dérivés du pétrole aux États-Unis », a-t-il déclaré. Ce sont au total huit additifs synthétiques, largement répandus dans les produits alimentaires transformés, qui devront disparaître des rayons d’ici à la fin de l’année 2026.

Un consensus rare

Dans une Amérique souvent polarisée, cette annonce a étonnamment rallié un large soutien, tant au sein de la communauté scientifique que sur la scène politique. Des organisations de défense des consommateurs, comme le Center for Science in the Public Interest (CSPI), se félicitent de cette avancée. « Les preuves s’accumulent depuis des décennies sur les dangers de ces colorants », explique Peter Lurie, président du CSPI. « Il était grand temps que la FDA agisse. »

Parmi les colorants ciblés figurent le « Red 40 » (E129), « Yellow 5 » (E102) et « Yellow 6 » (E110), tous trois omniprésents dans des milliers de produits allant des bonbons aux céréales, en passant par les boissons sucrées et les sauces industrielles. Longtemps défendus par l’industrie agroalimentaire pour leur rôle dans l’apparence des aliments, ces additifs sont de plus en plus accusés de contribuer à divers troubles de santé, notamment l’hyperactivité chez l’enfant, le diabète, et même certains cancers.

Une rupture avec des décennies de tolérance

« Au cours des 50 dernières années, les enfants américains ont vécu dans une soupe toxique de produits chimiques artificiels », a affirmé le Dr Makary, citant plusieurs études établissant un lien entre ces substances et des effets délétères sur la santé humaine. La décision actuelle prolonge l’interdiction, déjà annoncée en janvier par l’ancienne administration démocrate, du colorant « Red 3 » (E127 en Europe), reconnu depuis les années 1990 comme cancérogène chez les animaux.

Si cette mesure a de quoi réjouir les partisans d’une alimentation plus naturelle, elle pose également un défi logistique à l’industrie agroalimentaire, qui devra reformuler nombre de ses produits. Des solutions de remplacement existent toutefois : de plus en plus de fabricants se tournent vers des colorants d’origine végétale, comme le jus de betterave, le curcuma ou le paprika.

Vers une alimentation plus transparente ?

La décision de l’administration Trump s’inscrit dans une dynamique mondiale où la pression des consommateurs pousse à une transparence accrue des ingrédients et à une réduction des additifs chimiques. L’Union européenne, souvent plus stricte sur le plan réglementaire, a déjà restreint l’usage de plusieurs de ces colorants.

Reste à voir si les États-Unis poursuivront sur cette voie et étendront leurs mesures à d’autres substances controversées, comme les édulcorants artificiels ou les conservateurs chimiques.

Dans un pays où l’alimentation industrielle règne en maître, la suppression des colorants synthétiques pourrait bien marquer le début d’un virage culturel profond.

Cathy Manga