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Casamance : Trente ans de mystère autour de la disparition de quatre touristes français

Casamance : Trente ans de mystère autour de la disparition de quatre touristes français

Avril 1995. En pleine guerre entre les combattants indépendantistes du Mouvement des Forces Démocratiqques de la Casamance (MFDC) et l’armée sénégalaise, quatre citoyens français disparaissent sans laisser de trace. Trois décennies plus tard, l’affaire demeure irrésolue.

Il y a exactement trente ans, une affaire humaine et diplomatique marquait durablement les relations entre la France et le Sénégal.

En avril 1995, deux couples d’amis originaires de la région Auvergne-Rhône-Alpes en France – Martine et Jean-Paul Gagnaire, Catherine et Claude Cave – disparaissaient alors qu’ils voyageaient en Casamance, une province méridionale du Sénégal entre la Gambie et la Guinée-Bissau, en proie à un conflit indépendantiste.

Les quatre touristes, âgés d’une quarantaine d’années, séjournaient dans un campement touristique à Ziguinchor. Ils avaient prévu une excursion en voiture 4×4 vers Cap Skirring, destination prisée des voyageurs. Leur trace s’efface sur la route entre Skirring et Oussouye. Leurs effets personnels, leur véhicule, tout semble s’être volatilisé. La voiture blanche qu’ils utilisaient sera retrouvée non loin d’une caserne militaire à Effock, sans indice concluant.

Une disparition en zone de conflit

À l’époque, la Casamance est secouée par une rébellion armée menée par le Mouvement des Forces Démocratiques de la Casamance (MFDC), qui réclame l’indépendance de cette région enclavée entre la Gambie et la Guinée-Bissau. Le territoire, malgré son potentiel touristique, est le théâtre d’affrontements sporadiques entre l’armée sénégalaise et les combattants indépendantistes. Les voyageurs français ont disparu dans ce contexte tendu, à un moment où les troupes sénégalaises en difficulté faisaient face à un isolement logistique accru dans plusieurs villages environnants.

Dès le signalement de leur absence, les autorités sénégalaises, appuyées par la diplomatie française, mettent en place un vaste dispositif de recherche : survols aériens, fouilles de villages, exhumation de sépultures… Mais aucune piste sérieuse ne permet de retrouver les disparus.

Rumeurs, incertitudes, et silence diplomatique

L’affaire prend rapidement une dimension internationale. Tandis que les familles en France mènent une campagne médiatique et politique pour obtenir des réponses, les hypothèses se multiplient : enlèvement, exécution, implication d’acteurs locaux… Sans jamais aboutir. Des rumeurs contradictoires circulent dans la presse locale et internationale : certains témoins disent les avoir vus près de la frontière, d’autres évoquent un trafic d’armes ou même une détention par l’armée. Le MFDC dément toute responsabilité, se disant « préoccupé par le sort de ces étrangers ».

Au fil des années, les proches des victimes sollicitent les autorités françaises à plusieurs reprises. En 1995, ils rencontrent le ministre des Affaires étrangères Alain Juppé, puis Lionel Jospin en campagne présidentielle. En 2012, le président François Hollande évoque l’affaire lors d’une visite officielle au Sénégal. À cette occasion, les familles renouvellent publiquement leur appel à la vérité : « Nous ne savons pas s’ils sont morts. Nous voulons juste savoir, et qu’on nous rende les corps », déclare Maxime Gélifier, porte-parole et beau-frère de l’un des disparus.

Une mémoire toujours vive

Malgré un procès en 2004 à Saint-Étienne, où les rares témoignages entendus ne permettent pas de conclure, l’affaire reste une énigme. Selon certaines sources, un témoin-clé, Abasse Goudiaby, propriétaire du campement ayant hébergé les couples, aurait été contraint par les autorités militaires sénégalaises de quitter sa Casamance natale après avoir été intimidé et malmené.

Les quatre touristes disparus, figures connues dans leurs communautés respectives en France, laissent derrière eux des familles endeuillées mais mobilisées, refusant l’oubli. En avril 1995, près de 500 personnes marchaient à Saint-Étienne pour leur rendre hommage. Trente ans plus tard, la même volonté demeure : « Ce que nous demandons, ce n’est pas une vengeance, mais une réponse », confient encore aujourd’hui leurs proches.

Cathy Manga

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