Philippines: Accord de paix historique avec le Front Moro islamique de libération
Le président des Philippines et le dirigeant du principal mouvement séparatiste musulman ont signé jeudi 27 mars à Manille un accord de paix historique qui doit mettre fin à l’une des guérillas les plus longues et les plus meurtrières d’Asie.
« Cet accord détaillé sur [la région] Bangsamoro couronne notre combat », a déclaré Mourad Ebrahim, le chef du Front Moro islamique de libération (FMIL, ou MILF en anglais pour « Moro Islamic Liberation Front »). La province se situe sur l’île de Mindanao, dans le sud de l’archipel.
Le gouvernement philippin et la rébellion indépendantiste musulmane avait annoncé fin janvier qu’ils étaient en passe de signer un accord de paix après avoir levé les derniers obstacles pour mettre fin à une insurrection qui a fait près de 150 000 morts depuis ses débuts dans les années 1970.
LeFMIL a promis de déposer les armes en échange de la création d’une région autonome en territoire largement musulman, dans un pays catholique à 80 %. Cette cérémonie officielle est le point d’orgue de longs mois de négociations entre le mouvement rebelle et les représentants du gouvernement, sous l’impulsion du président Benigno Aquino.
Les dirigeants du FMIL seront à la tête d’une autorité provisoire de la région, avant la tenue d’élections régionales en 2016. La région autonome, qui comprendra 10 % du territoire philippin, sera laïque et disposera de sa propre police, d’un parlement régional et du pouvoir de lever les impôts. La défense restera une prérogative du gouvernement central.
Les cinq millions de musulmans philippins (sur une population proche de 100 millions) considèrent le Sud comme leur terre ancestrale et le FMIL a mené la lutte pour l’indépendance, avant d’accepter au final la création d’une région autonome.
Mais le mouvement séparatiste musulman, le gouvernement et les observateurs indépendants soulignent qu’une paix durable est loin d’être garantie et que de nombreuses embûches doivent être évitées d’ici à mi-2016, fin du mandat unique de Benigno Aquino.
Parmi ces obstacles, d’autres groupes de guérilla, dont les Combattants islamiques pour la liberté de Bangsamoro, pourraient chercher à faire dérailler les accords en lançant des attaques dans le Sud. Autre groupe rebelle dissident, le Front Moro de libération nationale (FMLN, ou MNLF en anglais pour « Moro National Liberation Front »), rival du FMIL, qui avait conclu un premier accord avec Manille en 1996, largement considéré comme un échec.
Pour que l’accord entre en application, le Congrès doit également voter une « loi fondamentale ». Or des responsables politiques catholiques du Sud sont opposés à cet accord de paix, qui pourrait les marginaliser. Ils chercheront à repousser cette loi au Parlement, préviennent les analystes.
Le Monde